Makestorming, les piliers d'une nouvelle façon de travailler: l'action plus que le plan d'action

01 janvier 1970

Le Makestorming se diffuse dans les organisations en mode viral, à la fois bottom-up et top-down selon qui se l’approprie et en devient acteur. Il repose sur cinq grands principes : "L'union fait la force", "La désobéissance pour bien faire", "L'action plus que le plan d'action", "Qui-fait-quoi plutôt que qui-est-qui" et "À grand pouvoir, grandes responsabilités". Cinq principes sur lesquels s’appuyer pour commencer à hacker la culture des organisations classiques et progressivement, acte par acte, hack par hack, créer l’entreprise que l’on souhaite pour demain.

Makestorming, le Guide de Corporate Hacking sort le 2 juin aux éditions Diateino.

Rejoignez-nous pour une soirée débat le 24 mai, pour discuter avec Stéphanie Bacquère et Marie-Noéline Viguié, auteures du livre et fondatrices de Makestorming, et Corinne Werner, Pierre Pezziardi et Philippe Lemoine.

Principe #3 : l’action plus que le plan d’action

« N’oubliez pas que la planification est un outil qui fonctionne uniquement en cas d’expérience, d’exploitation longue et stable. Et pourtant, l’un d’entre nous a-t-il l’impression que le monde qui nous entoure devient chaque jour un peu plus stable ? »

– Eric Ries, Lean Start-up

Halte aux grands mots qui ne servent à rien et aux objectifs délirants qui conduisent au surplace ! Le corporate hacker ne multiplie pas les adjectifs pontifiants, il préfère conjuguer ambition et réalisme.

C’est un travers de plus en plus accentué dans les grandes entreprises : l’abus de « plans d’action », avec en arrière-fond, conscient ou inconscient, le mythe de la solution idéale qui conduit à l’inaction.

(Retrouvez le pilier #2 du corporate hacking ici: la désobéissance pour bien faire)

On a vu des entreprises de plusieurs milliers de personnes mettre trois ans à sortir une appli mobile, alors que la start-up d’à côté, avec cinq personnes, lance la même appli en trois mois. Dans un autre registre, quand Free a racheté Alice à Telecom Italia, les services marketing d’Alice ont dû reconnaître que Free faisait mieux avec vingt fois moins de salariés. À chaque fois, c’est la même chose. Le problème n’est pas la taille de l’entreprise, c’est le temps perdu à étudier, planifier, valider la solution parfaite – celle que ses milliers de soldats pourront déployer telle une armée invincible.

Sauf que la solution parfaite n’existe pas.

Et quand bien même elle existerait, dans un monde comme le nôtre qui bouge vite, le parfait d’aujourd’hui ne sera plus parfait demain. Et pendant qu’on rivalise de présentations PowerPoint pour se demander ce qu’on pourrait faire, d’autres boîtes se contentent de faire.

L’adaptation au changement plus que le suivi d’un plan : ce principe phare de l’éthique hacker a été repris en 2001 comme l’une des quatre valeurs fondamentales du Manifeste agile publié en 2001. Ce qu’on peut aussi traduire ainsi : l’essentiel est le mouvement, dès lors que l’on sait réfléchir en avançant, et accepter les évolutions en cours de développement pour réagir et les intégrer.

En mode Makestorming, cela se traduira ainsi :

Accepter l’imperfection :

Le corporate hacker n’est pas forcément opposé aux plans, mais il préfère l’action. Surtout quand il s’agit d’innovation ! Plutôt que de perdre du temps à viser la perfection, il avance par projets successifs, en recherchant à chaque étape des résultats concrets pour faire la preuve par l’exemple, sans craindre l’imperfection. Et s’il n’obtient pas de résultats ? Eh bien il en tire les conséquences et apprend de ses erreurs. C’est la fameuse citation de Beckett :
« Essaie encore. Échoue encore. Échoue mieux. »

Faire primer le réel sur la théorie :

Si les grands discours des dirigeants ou des managers ont si peu de prise sur le réel, c’est parce que les cadres se soucient bien peu de l’exécution. Au pire, c’est un mépris : les cols blancs méprisent les cols bleus et auraient l’impression de se salir les mains en évoquant les contraintes de production. Au mieux, ils se rassurent en restant sur le plan de la théorie parce qu’ils ne savent pas (ou plus) faire grand-chose en pratique. « Il ne faut pas laisser les intellectuels jouer avec des allumettes », disait Prévert. Il avait bien raison. Combien de réunions s’achèvent avec des plans sur la comète dont tout le monde sait déjà qu’il n’en adviendra rien ? Quel temps perdu ! Faire primer le réel, ce n’est pas s’interdire de voir loin. C’est s’interdire de travailler dans le vide.

Viser la meilleure solution possible :


Le corporate hacker vise haut mais se soucie du réel. Dans sa tête, il porte à la fois le col blanc du cadre responsable, le T-shirt du « startupper » créatif et la blouse de l’ouvrier. Il se moque des grandes idées qui ne servent à rien. Ce qui lui importe en permanence, c’est la meilleure des solutions possibles au carrefour de ce qui est ambitieux et de ce qui est faisable, selon le temps disponible, les moyens alloués et les compétences de chacun.

Adopter le « Quick n’ Dirty » :


On appelle « Quick n’ Dirty » (« rapide et grossier ») une solution imparfaite qui permet de résoudre un problème plus rapidement que la « solution appropriée » conforme au fameux état de l’art. Les solutions « Quick n’ Dirty » sont fréquentes en informatique pour pallier un problème temporaire, tandis qu’on cherche par ailleurs une solution plus durable. Elles sont aussi utilisées par les biologistes, et d’autres scientifiques, pour valider (ou invalider) une première hypothèse de travail avant de mettre en place un protocole plus important, mais aussi à la maison quand on rafistole un objet cassé. C’est pas beau, mais en attendant, ça fonctionne !

Dans l’entreprise, le Quick n’ Dirty peut devenir une forme de corporate hacking. C’est exactement le rôle du prototype que nous développons en Makestorming.

Quick n’ Dirty : les bidouilleurs du marketing

Le mot « hacker » se traduit parfois par « bidouilleur ». C’est bien le cas de ces marketeurs débrouillards d’une grosse PME américaine. La direction informatique, comme dans tant de boîtes, s’était constituée en baronnie. Formalisme, délais rallongés et budgets en hausse : peu à peu, elle s’éloignait des besoins de ses clients internes. Un rapport hebdomadaire sur l’audience d’un site Web ? Il fallait plusieurs mois pour le construire.

Exaspérés par ces blocages, des designers graphiques de la direction marketing ont développé en quelques jours un outil largement imparfait (ils s’étaient formés rapidement au langage PHP), mais suffisant pour la plupart de leurs besoins. Petit à petit, le mot est passé dans l’entreprise : des gars au marketing savaient bidouiller des programmes sur tous les sujets. Le département informatique s’est peu à peu laissé déborder jusqu’au jour où l’un des projets phares a été arrêté parce qu’un des projets des bidouilleurs du marketing était jugé suffisant.

« Certes », dirait un organisateur parfait, « mais si tout le monde commence à faire des choses dans son coin, c’est le bordel ». Le directeur informatique de l’entreprise n’a pas dit autre chose : drapé dans safierté, il a annoncé que ses équipes refuseraient de toucher à l’outil bidouillé. Le résultat ? Quelques mois plus tard, la direction marketing a embauché un ingénieur expérimenté et créé un département dédié aux nouvelles applications. La direction informatique, elle, a été peu à peu reléguée à un rôle d’exécution et de maintenance. Hackée !

Avancer en mode agile: la boussole plutôt que la carte

Les plans peuvent servir : ils permettent de s’orienter, d’étudier le terrain. Mais tracer à l’avance son chemin, et vouloir s’y tenir, c’est illusoire. Certes, aucune entreprise ne se monte sans business plan. Mais, comme le rappelle l’entrepreneur Steve Blank sur son blog : « Aucun business plan ne survit au premier contact avec un client. » Autant le savoir dès maintenant !

Plus que le plan, le Makestorming préfère la boussole pour s’orienter. Fixer un cap, avancer sans rester le nez rivé sur la carte, en regardant devant soi et autour. Puis s’arrêter un instant, et voir où on en est pour éventuellement corriger la trajectoire.

Entre deux avancées, on fixera des objectifs intermédiaires, avec à chaque fois quelque chose de concret à montrer (un prototype, une version alpha, ou bêta...) et une règle d’or : priorité à ce qui marche. Si ça marche, même si on ne sait pas exactement pourquoi, on continue. Si ça ne marche pas, on ne cherche pas de coupable : on analyse et on change de direction.

Voilà ce qu’on appelle penser en avançant : être capable d’avancer par projets successifs et de se remettre en cause en permanence, en acceptant les critiques et surtout en les intégrant, en sachant bifurquer quand la boussole l’exige. C’est une habitude à prendre, une disposition d’esprit agile à conserver en permanence.

Extrait tiré de Makestorming, le Guide de Corporate Hacking.

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